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Introduction
« Un avenir peu prometteur »
Programme de réinstallation financé par le gouvernement à Terre-Neuve et au Labrador depuis 1949 Dans un communiqué daté du 29 octobre 1957, J.R. Smallwood, premier ministre de Terre-Neuve, disait estimer qu'il serait possible de réinstaller jusqu'à 50 000 Terre-Neuviens disséminés dans quelque 200 hameaux qui avaient devant eux « un avenir peu prometteur » (collection Stacey, Centre for Newfoundland Studies). Les photos réunies dans ce site sont associées aux divers programmes de réinstallation instaurés par le gouvernement à Terre-Neuve et au Labrador de 1954 à 1975. Si la tendance à l'urbanisation était manifeste avant 1954, l'intervention directe du gouvernement, elle, était une mesure tout à fait inusitée qui a suscité beaucoup de controverse. Le gouvernement Smallwood avait deux grands objectifs en tête. D'une part, il voulait garantir à tous les citoyens de la province un niveau raisonnable de services gouvernementaux ainsi que l'accès au téléphone et à l'électricité. Les établissements de santé, les écoles, les routes, les bureaux de poste et d'autres services pourraient être offerts de façon économique et efficace. Mais, pour que cela puisse se faire, il fallait convaincre les résidents des hameaux isolés d'aller s'établir dans des centres plus peuplés. D'autre part, le gouvernement était résolu à moderniser l'industrie de la pêche en favorisant l'introduction d'une technologie de pointe dans les secteurs de la capture et de la transformation - des chalutiers, des installations de transformation et des installations portuaires coûteuses. En outre, l'administration Smallwood cherchait à attirer de nouvelles industries dans la province, et elle avait prévu un train de mesures ambitieux pour diversifier l'économie provinciale. Elle voulait notamment concentrer l'industrialisation dans les grands centres; il fallait donc y réunir des bassins de main-d'uvre suffisants. En 1954, le gouvernement provincial, par l'intermédiaire du ministère du Bien-Être, a commencé à verser un soutien financier aux familles qui étaient disposées à se réinstaller ailleurs. Au départ, l'aide accordée couvrait uniquement le coût du déménagement. Cette indemnité a plus tard été remplacée par un paiement forfaitaire versé à chaque famille, qui atteignait à l'origine un maximum de 150 $ pour s'accroître progressivement jusqu'à 600 $. Chaque ménage de la collectivité devait accepter de déménager avant que les fonds ne soient versés. De 1954 à 1965, 110 hameaux comptant une population totale d'environ 7 500 personnes ont ainsi été abandonnés. Un nouveau programme fédéral-provincial de réinstallation administré par le ministère des Pêches a vu le jour en 1965. Les modalités en étaient les suivantes: chaque foyer était admissible à une subvention de 1 000 $ et à 200 $ de plus pour chaque personne à charge, à condition que 90 % (ce chiffre a plus tard été ramené à 80 %) des ménages de la collectivité acceptent de déménager à un centre de croissance désigné. De plus, le programme prévoyait le remboursement des frais de déménagement et le versement d'une indemnité maximale de 3 000 $ pour la perte d'un terrain viabilisé. En 1970, les gouvernements fédéral et provincial ont conclu une seconde entente qui conférait la responsabilité conjointe du programme au ministère fédéral de l'Expansion économique régionale (MEER) et au ministère provincial du Développement communautaire et social. De 1965 à 1975, 20 000 personnes de plus, disséminées dans 148 localités, ont abandonné leur village. Plusieurs régions ont été touchées, dont les îles de la baie de Placentia, de la baie de Bonavista et de la baie de Notre Dame, ainsi que la côte Sud-Ouest. Burgeo, Harbour Breton, les villages situés dans la partie sud de la péninsule de Burin et les collectivités de la région de Placentia ont toutes accueilli des familles qui avaient accepté de se réinstaller. Au Labrador, la réinstallation était moins concentrée, la plupart des déplacements survenant dans des collectivités situées sur la côte Sud-Est, en vertu d'une modification au programme qui permettait à des ménages individuels de se réinstaller à certaines conditions précises. La plupart des familles labradoriennes qui se sont prévalues du programme ont abouti à Mary's Harbour ou à Cartwright. Le programme de réinstallation suscitant une grogne croissante, le gouvernement a mis fin à son intervention active dans les années 1970. Les emplois étaient rares dans les régions d'accueil, les progrès industriels attendus ne se matérialisaient pas, et bon nombre des familles réinstallées reprochaient au gouvernement de les avoir forcées de quitter leur foyer - sinon par des pressions directes, du moins sur les instances des autres habitants de leur collectivité. De plus, le gouvernement avait fait savoir que les services seraient interrompus si la population d'un hameau donné baissait en dessous d'un certain niveau. Néanmoins, les études menées par la suite ont révélé que la plupart - mais certainement pas l'ensemble - des familles réinstallées étaient satisfaites de leur choix, citant comme avantages des facteurs tels que de meilleures possibilités d'éducation. De 1946 à 1975, ce sont quelque 307 collectivités qui ont été abandonnées et plus de 28 000 personnes qui ont quitté leur village pour aller s'installer ailleurs. Par le cinéma, par la poésie, par les arts visuels ou par la musique, la réaction au programme de réinstallation est devenue, au cours des années 1970, un important thème politique dans la renaissance culturelle de la province. Le programme a eu des effets profonds sur la vie des personnes touchées, et il continue d'éveiller une résonance dans la culture et la mentalité collective des résidents de la province. Les photos présentées ici sont un reflet fascinant des programmes de réinstallation plus de 30 ans après leur mise en place. Cette exposition virtuelle contient des photographies obtenues pour la plupart de personnes qui ont abandonné leur hameau, ce qui nous permet de voir la réinstallation comme elles-mêmes l'ont perçue. Il était impossible de recueillir et d'afficher des photos de l'ensemble des hameaux abandonnés. Nous en avons donc choisi douze – Battle Harbour, British Harbour, les îles Colinet, Deer Harbour, Exploits, Fair Island, Hooping Harbour, Ireland's Eye, Merasheen, Point Rosie et Sops Island - pour présenter ce que nous croyons être un échantillon représentatif. Nous avons également ajouté des images de deux collectivités qui ont accueilli de nouveaux habitants dans le cadre du programme de réinstallation, Arnold's Cove et Salvage. (Les renseignements qui précèdent proviennent en grande partie de l'article sur la réinstallation de l'Encyclopedia of Newfoundland and Labrador, vol. IV, pp. 588-590.) Archives d'histoire maritime © 2004
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